File d'attente
"Trois heures sur le trottoir parfois. C'est très rassurant. Si l'on attend, c'est qu'il y a quelque chose à voir. Toujours ce petit regard étonné quand on découvre l'ampleur de la catastrophe, le serpent humain étiré sur trois cents mètres de longueur. Mais on trouve sa place. La soumission courtoise de la foule semble des plus réconfortantes. Après être resté parfaitement immobile pendant une demi-heure, c'est délicieux de sentir une onde d'espérance s'ébranler, caresser la colonne vertébrale du troupeau : mine de rien, regard absent, on vient d'avancer de trois mètres, à pas presque latéraux. Rien que des gens civilisés, pas de compression excessive. Chaque homme reste une île."
(Philippe DELERM)